Témoignages

Que ceux qui ne veulent pas voir vivent les yeux fermés…A tous nos anges à l'âme cassée

Mon petit ange tout cassé. Mais que t’ont-ils donc fait ?

Quelles sont ces vilaines balafres qui sillonnent ton cou ? Comment ont-ils osé ?

Tu es si jeune, si doux, si tendre. Tu es mon ange immaculé.

Pour eux un simple objet. Tes grands yeux si inquiets.

Ton corps tendu qui sursaute au moindre geste. Ta peur de franchir le seuil, de te retrouver enfermé, où tout peut arriver. Comme j’aime te regarder dormir, les yeux enfin clos.

Ce long sommeil si mérité que là-bas tu n’as jamais pu trouver.

Trop de tension, de promiscuité, trop de peurs accumulées. Ici tu dors profondément, chaque jour tu t’étends un peu plus sur ce canapé devenu ton lieu de sécurité. J’y ai déposé quelques os à ronger.

 Je sens ton regard sur moi quand tu es couché, la tête entre les pattes.

Tes yeux grands ouverts qui ne cillent pas et qui m’observent inlassablement.

Tes pupilles dilatées comme pour fouailler au tréfonds de moi, tu me sondes, tu t’interroges, tu te demandes ce que j’attends de toi, si tu peux me faire confiance. Pourquoi me ferais-tu confiance d’ailleurs ?

Jusqu’à présent tu n’as connu que les coups, la souffrance et les cris.

Tu as très peur de la main humaine, et même ces petits gâteaux que tu aimes tant ne te feront pas approcher dès que la main se tend vers toi. Même la voix te fait sursauter. Alors c’est un dialogue muet que nous avons entamé. Nous nous regardons, et en silence avec les yeux nous nous parlons.

Comment peut-on en arriver là ?

Quel est ce monde où l’on ne panse plus… que les blessures ?

Mon petit ange tout cassé. Mais que t’ont-ils donc fait ?

Quand tu es arrivé en France on pensait mettre la lumière sur toi, on pensait te faire exister. Enfin, toi l’anonyme. Mais aucun regard ne s’est posé sur toi, pas une demande, pas une question.

Tu es devenu l’invisible, celui que personne ne voit. France/Espagne : même combat ?

Mon pauvre ange, personne n’a voulu de toi. Cela me crève le cœur pour toi, c’est comme si on t’abîmait une nouvelle fois.

Combien de temps encore devras-tu payer pour le mal que l’on t’a fait ?

Mais laissons-les t’ignorer. Ils ne comptent pas. Ils ne comprennent pas. Moi, je te garderai, non contrainte et forcée, mais parce que je sais celui que tu es et que je vois celui que tu deviendras.

Jour après jour je réparerai ta petite âme cassée, je panserai ces blessures que l’on t’a faites et tu deviendras celui qu’au plus profond tu as toujours été.

Et que ceux qui ne veulent pas voir vivent les yeux fermés.

Pour Milka (ex-Miguel).Val son adoptante

 

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